"Séjour où des corps vont cherchant chacun son dépeupleur. Assez vaste pour permettre de
chercher en vain. Assez restreint pour que toute fuite soit vaine. C’est l’intérieur d’un cylindre
surbaissé ayant cinquante mètres de pourtour et seize de haut pour l’harmonie. Lumière. Sa
faiblesse. Son jaune. Son omniprésence comme si les quelque quatre-vingt mille centimètres
carrés de surface totale émettaient chacun sa lueur. Le halètement qui l’agite. Il s’arrête de loin
en loin comme un souffle sur sa fin. Tous se figent alors. Leur séjour va peut-être finir. Au bout
de quelques secondes tout reprend. Conséquences de cette lumière pour l’oeil qui cherche.
Conséquences pour l’oeil qui ne cherchant plus fixe le sol ou se lève vers le lointain plafond où
il ne peut y avoir personne. Température. Une respiration plus lente la fait osciller entre chaud
et froid. Elle passe de l’un à l’autre extrême en quatre secondes environ. Elle a des moments de
calme plus ou moins chaud ou froid. Ils coïncident avec ceux où la lumière se calme. Tous se
figent alors. Tout va peut-être finir. Au bout de quelques secondes tout reprend. Conséquences
pour les peaux de ce climat. Elles se parcheminent. Les corps se frôlent avec un bruit de
feuilles sèches. Les muqueuses elles-mêmes s’en ressentent. Un baiser rend un son indescriptible.
Ceux qui se mêlent encore de copuler n’y arrivent pas. Mais ils ne veulent pas l’admettre."
Samuel Beckett Le Dépeupleur Paris, éd. de Minuit, 1970
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Samuel Beckett |