|
Gilles Sabrié - L'école : la sieste : + : |
Dans le lit, à coté de ma petite sœur, j'écoute le chant qui vient de la cour. La vie est transformée par ces voix, ces présences, par leur entrain, la haute estime qu'elles ont pour elles-mêmes et pour les autres. Pour mes parents, pour nous tous, ce sont les vacances. Le mélange des voix et des paroles est si compliqué et si varié qu'on a l'impression que cette confusion, cette joyeuse rivalité vont continuer éternellement : alors, à ma surprise - car je suis surprise, bien que sachant comment se compose un canon -, le chant s'amenuise, l'on entend les deux voix qui s'évertuent.
Sois heureux, le monde est beau,
La vie n'est qu'un rêve.
Puis une seule voix, celle qui continue bravement, jusqu'à la fin. Une voix dans laquelle perce une note inattendue de supplication, d'avertissement, tandis qu'elle suspend dans l'air, l'une après l'autre, les dernières paroles : La vie - attends - n'est - doucement, attends - qu'un rêve.
Alice Munro, Les lunes de Jupiter, Les Chaddeley et les Fleming, 1977, traduite de l'anglais (Canada) par Colette Tonge
|
Galiéo - Barcelone sieste : + : |