vendredi 31 mai 2013

Mensonge qui connaît le nœud :

 
Camille Cier - mère à l'enfant                                                                                                                                    : + :


En ce monde où nous oublions,
Nous sommes ombres de qui nous sommes;
Les gestes réels qui sont les nôtres
En l’autre où, âmes, nous vivons,
Sont ici-bas grimaces et simulacres.
Tout est nocturne et confus
Dans ce qui existe ici parmi nous.
Projections, fumée diffuse
Du brasier qui brille mais se dérobe
Au regard dont la vie nous dote.
Mais quelques-uns, pour un moment,
S’ils regardent bien, réussissent
A voir au creux de l’ombre et de son mouvement
Quelle est en l’autre monde l’intention
De ce geste qui les fait vivre.
Alors ils rencontrent le sens
De ce qui s’étourdit ici-bas de grimaces,
Et tournent vers leur corps en allé,
Imaginé mais bien compris,
L’intuition d’un simple regard.
Ombre du corps, qui languit,
Mensonge qui connaît le nœud
L’attachant à la merveilleuse
Vérité qui le lance, éperdu de désir,
Contre le sol du temps et de l’espace.

Fernando Pessoa, Poemas Ocultistas, 09/05/1934


Gali Tibbon - Lalibela, Jerusalem of Africa                                                                                                                          : + :


dimanche 26 mai 2013

Dire quelque chose :


 
Les oiseaux vont mourir au Pérou - Romain Gary - 1968


Mon erreur a été de croire aux victoires individuelles. Aujourd'hui que je n'existe plus, tout m'a été rendu. Les hommes, les peuples, toutes nos légions me sont devenus alliés, je ne parviens pas à épouser leurs querelles intestines et demeure tourné vers l'extérieur, au pied du ciel, comme une sentinelle oubliée. Je continue à me voir dans toutes les créatures vivantes et maltraitées et je suis devenu complètement inapte aux combats fratricides.
Mais pour le reste, qu'on veuille bien regarder attentivement le firmament, après ma mort : on y verra, aux côtés d'Orion, des Pléiades ou de la Grande Ourse, une constellation nouvelle: celle du Roquet humain accroché de toutes ses dents à quelque nez céleste.
Il m'arrive même encore d'être heureux, comme ici, ce soir, étendu sur la plage de Big Sur, dans le crépuscule gris et vaporeux, alors que le cri lointain des phoques me parvient des rochers et qu'il me suffit de lever à peine la tête pour voir l'Océan. Je l'écoute très attentivement et j'ai toujours l'impression que je suis sur le point de comprendre ce qu'il cherche à me confier, que je vais enfin briser le code et que le murmure insistant, incessant du ressac, essaye, presque avec véhémence, de me dire quelque chose, de me donner une explication.
Dans ma main gauche, je serre la médaille d'argent du championnat de ping-pong que j'ai gagné à Nice, en 1932.
On peut me voir encore souvent ôter ma veste et me jeter soudain sur le tapis, me plier, me déplier et me replier, me tordre et me rouler, mais mon corps tient bon et je ne parviens pas à m'en dépêtrer, à repousser mes murs. Les gens croient en général que je fais seulement un peu de gymnastique et un grand hebdomadaire américain a publié sur deux pages ma photo en plein exercice, comme un exemple digne d'être suivi.
J'ai été assez malade, après la guerre, parce que je ne pouvais marcher sur une fourmi ou voir un hanneton dans l'eau, et finalement, j'ai écrit tout un gros livre pour réclamer que l'homme prenne la protection de la nature dans ses propres mains. Je ne sais pas ce que je vois au juste dans les yeux des bêtes, mais leur regard a une sorte d'interpellation muette, d'incompréhension, de question, qui me bouleverse complètement. Je n'ai d'ailleurs pas de bêtes chez moi, parce que je m'attache très facilement et, tout compte fait, je préfère m'attacher à l'Océan, qui ne meurt pas vite.
 Romain Gary, La promesse de l'aube, 1960



vendredi 24 mai 2013

Dis-moi que tu aimes :


Bruno Mouron et Pascal Rostain - Global Trash - Ivry-sur-seine
 
C’est l’été c’est l’été c’est l’été tout est prêt tout est presque prêt les bières au frais les piles de livres Bonjour Tristesse en haut de la pile Gatsby le Magnifique en haut de la pile Les clowns lyriques en haut de la pile un martini et de la glace dans un verre qui fait cling c’est l’été
Le soleil disparaît derrière le rocher et la mer devient noire bleue noire et grise et bonsoir tristesse c’est l’été les hannetons volent un peu lourds chasse-les d’un geste assieds-toi finis ton verre tant que l’air est encore chaud
Il y aura le soleil du monde qui passe des chats des tomates des grains de sable partout jusque dans les draps assieds-toi dis-moi que tu aimes autant que moi le matin qui entre par les fenêtres ouvertes les draps blancs froissés les matins d’été de quand on n’a pas dormi beaucoup dis-moi que tu te souviens de cette odeur des matins d’été de l’air frais sur les jambes de la lumière qui entre en douce à travers les persiennes du silence et de l’inactivité dis-moi pourquoi on est plus heureux l’été plus nostalgiques l’été plus vivants l’été assieds-toi et dis-moi.
Élodie Valette, Que disent les listes, : + :


Bruno Mouron et Pascal Rostain - Global Trash -Malawi

jeudi 23 mai 2013

Les lèvres et la bouche :

 
Photographe anonyme - Tirage argentique d’époque 9 septembre 1928

Je tape un clou.
Je, pronom pers., tape, un
verbe, un clou, un symbole
de dureté et de force. Je
tape un clou – un
processus de travail.
 Ernst Herbeck, 100 poèmes


Ich schlage einen Nagel ein.
Ich, pers. Fürtwort, schlage, ein Zeitwort, einen Nagel ein, ein Symbol des Härte und der Kraft. Ich schlage einen Nagel ein – ein Arbeitsvorgang.


Photographe anonyme - Tirage argentique d’époque - Vers 1950

Rouge

Rouge est le vin, rouge sont les œillets
Rouge est beau. rouge les fleurs et rouge.
Coloris lui même est beau.
la couleur rouge est rouge.
Rouge le drapeau, rouge le pavot.
Rouge les lèvres et la bouche.
Rouge la réalité et la
Chute. Beaucoup de feuilles bleues sont rouges.
 Ernst Herbeck, Tout le monde a une bouche,






mardi 21 mai 2013

Si l’émotion voulait s’y prêter :


Hans Bellmer - La poupée                                                                                                                                                : + :



Un ange passe

Tard dans la nuit, seul face à moi, je & moi-même
Peu convaincu par cette pénible scène
Juste la lune, & les longs couloirs de l’angoisse
Tourner en rond, voir le temps qui s’efface
Penser à l’une, à l’autre, aux autres & à l’effort
De concevoir un esprit assez fort
Une idée pure, un peu plus belle de la chair
Camouflée derrière ce masque de fer
À l’abondance, la danse des souvenirs froids
De ces nuits chaudes s’insinue en moi
Dans le miroir, deux yeux verts brillent & me rappellent
Les deux visages arborés par ma belle

Relever un autre défi
Condamner un autre pari
Sans cesse un ange passe & me rend silencieux
Déception séduisante qui me rend furieux
Lassante ambition mensongère
Que cette fuite de la mer
Peut-être devrais-je renoncer
Si le printemps voulait s’y prêter

Soirées d’été, soirées d’intense & de désirs
Tâchant ici de fonder un empire
Tant de visages, vite embrassés, vite oubliés
& ces corps blancs, décevants, accueillants
Sans une quête, à quoi se mesure la vie ?
L'enquête dira quelle est mon envie
Penser à l’une, être déjà dans la suivante
Le temps d’une aversion trop captivante
À les entendre, il s’agirait du septième ciel
Alors qu’il s’agit juste d’un bon miel
Mieux vaut mentir, & être un menteur sublimé
Qu’avouer si cruelle vérité

S’embourber dans un jeu d'ego
& ne plus jouer aux legos
Sans cesse un ange passe & me rend ambitieux
Vision hallucinante & instant litigieux
Lassante pulsion d'espérance
D’un autre voyage à Florence
Peut-être voudrais-je renoncer
Si l’émotion voulait s’y prêter

Tout ça pour ça, voudrait me dicter la raison
« VIENS avec moi » me dictent leurs saisons
J’entends la voix, & je m’incline pour connaître
Cet amour qui, peut-être, m’a fait naître
« Aime-moi vite, montre-moi tes secrets d’état »
Les secrets d’état d’âme ne comptent pas
Dans ce flot-là, qu’importe de vouloir mourir
Mieux vaut rester une statue de cire
Juste rentrer, se persuader de l’aimer
Faire le boulot, surtout ne pas crier
Peut-être un jour, je verrai la fin des tunnels
Il faudra bien que je me lasse d’elles

S’amouracher d’une hirondelle
& souvent se brûler les ailes
Sans cesse un ange passe & me ment par ses formes
Des fois qu’elle serait elle, je me déguise en homme
Bandante est la métamorphose
Trop souvent lassante est la chose
Peut-être oserais-je renoncer
Si l’âme sœur voulait s’y prêter

Oh ! mon ange, délivre-moi de ces folles…
 Shaomi, fragments nocturnes, : + :


Hans Bellmer - 12 doublée de satin blanc ... -  1938-1949



dimanche 19 mai 2013

Le tombeau des sentiments :

Adam Panczuk - Karczeby                                                                                                                                      : + :




Devant une Bougie

J'ai façonné d'or repoussé, comme
tu me l'avais, mère, expressément ordonné,
le chandelier d'où
elle me submerge peu à peu d'obscur au milieu
d'heures qui se brisent en miettes :
la fille de ton
être-morte.

Svelte, élancé,
ombre mince aux yeux amandes,
la bouche et le sexe
pris dans la danse d'une faune de sommeil,
elle se dégage légère de l'or béant,
monte vers le sommet
du crâne du Maintenant.

Par mes lèvres tendues
de nuit
je prononce la bénédiction :

Au nom des trois
qui se combattent jusqu'à
ce que le ciel plonge dans le tombeau des sentiments,
au nom des trois dont les anneaux
me brillent au doigt chaque fois
que dans le gouffre je dénoue les chevelures des arbres,
pour qu'un flux généreux fasse retentir l'abîme -,
au nom du premier des trois,
qui poussa un cri
quand il s'agit de vivre là où sa parole déjà, avant lui,
avait été,
au nom du deuxième, qui regarda et pleura,
au nom du troisième qui met des pierres
blanches en tas au milieu :
je te dégage
de l'amen qui nous stupéfie,
de la lumière de glace qui le borde
là où la grise, la colombe
picore les noms
en deçà et au-delà du mourir :
tu restes, tu restes, tu restes
l'enfant d'une morte,
consacré au Non de ma désirance,
marié à une crevasse du temps
devant laquelle m'a conduit le mot-mère,
afin qu'une fois une seule
tremble soudain la main
qui ne cesse de m'étreindre le cœur !
Paul Celan traduit de l'allemand par Jean-Pierre Lefebvre









Vor einem kerze

Aus getriebenem Golde, so
wie du's mir anbefahlst, Mutter,
formt ich den Leuchter, daraus
sie empor mir dunkelt inmitten
splitternder Stunden:
deines
Totseines Tochter.

Schlank von Gestalt,
ein Schmaler, mandeläugiger Schatten,
Mund und Geschlecht

umtanzt von Schlummergetier,
entschwebt sie dem klaffenden Golde,
steigt sie hinan
zum Scheitel des Jetzt.

Mit nachtvergangnen
Lippen
sprech ich den Segen:

Im Namen der Drei,
die einander befehden, bis
der Himmel hinabtaucht ins Grab der Gephüle,
im Namen der Drei, deren Ringe
am Finger mir Glänzen, sooft
ich den Bäumen im Abgrund das Haar lös,
auf dass die Tiefe durchrauscht sei von reicherer Flut -
im Namen des ersten der Drei,
der aufschrie,
als es zu leben galt dort, wo vor ihr sein Wort schon gewesen,
im Namen des zweiten, der zusah und weinte,
im Namen des dritten, der weisse
Steine häuft in der Mitte, -
sprech ich dich frei
von Amen, das uns übertäubt,
vom eisigen Licht, das es säumt,
da, wo es turmhoch ins Meer tritt,
da, wo die graue, die Taube
aufpickt die Namen
diessets und jenseits des Sterbens:
Du bleibst, du bleibst, du bleibst
einer Toten Kind,
geweiht dem Nein meiner Sehnsucht,
vermählt einer Schrunde ser Zeit,
vor die mich das Mutterwort führte,
auf dass ein einziges Mal
erzittre die Hand,
die je und je mir ans Herz greift!

Adam Panczuk - Rythm of the land


mardi 14 mai 2013

Nous avons vécu ensemble :


: + :                                                   Beth Galton et Charlotte Omnès                                                   : + :


Un 87 quasi vide, un 86 à moitié plein
Les enfants jouent sous les piliers de l’église.
Un beau chien blanc taché de noir
Une lumière à un immeuble (est-ce l’hôtel Récamier?)
Un 96 quasi vide
Du vent
Un 63 plein, un 70 presque plein, un 63 presque plein
Un homme entre dans un café, se plante devant un consommateur qui se lève aussitôt et va pour régler sa consommation ; mais il n’a pas de petite monnaie et c’est l’autre qui paie. Ils sortent ensemble.
Un homme veut rentrer dans le café ; mais il commence par tirer la porte au lieu de la pousser
Fantomatismes
Passe un 70 plein
(fatigue)...
Georges Perec, Tentative d’épuisement d’un lieu parisien,  Cause Commune intitulé “Pourrissement des sociétés”, 1975, : + :


Beth Galton et Charlotte Omnès


Je ne sais pas si je n'ai rien à dire, je sais que je ne dis rien : je ne sais pas si ce que j'aurais à dire n'est pas dit parce qu'il est l'indicible (l'indicible n'est pas tapi dans l'écriture, il est ce qui l'a bien avant déclenché). Je sais que ce que je dis est blanc, est neutre, est signe une fois pour toutes d'un anéantissement une fois pour toutes.
(...) Je ne retrouverai jamais dans mon ressassement même, que l'ultime reflet d'une parole absente à l'écriture, le scandale de leur silence et de mon silence : je n'écris pas pour dire que je ne dirai rien, je n'écris pas pour dire que je n'ai rien à dire.
J'écris : j'écris parce que nous avons vécu ensemble, parce que j'ai été un parmi eux, ombre au milieu de leurs ombres, corps près de leur corps ; j'écris parce qu'ils ont laissé en moi leur marque indélébile et que la trace en est l'écriture : leur souvenir est mort à l'écriture : l'écriture et le souvenir de leur mort et l'affirmation de ma vie.
Georges Perec, W ou le souvenir d'enfance, 1975


Claude Tolmer - Bicycle

comment décrire ?
comment raconter ?
...comment lire les traces ?
...Comment saisir ce qui n’est pas montré, ce qui n’a pas été photographié, archivé, restauré, mis en scène ?
Comment retrouver ce qui était plat, banal, quotidien, ce qui était ordinaire, ce qui se passait tous les jours ?
...au début, on ne peut qu’essayer de nommer les choses, une à une platement,
les énumérer, les dénombrer, de la manière la plus banale possible,
de la manière la plus précise possible,
en essayant de ne rien oublier.
Georges Perec, Récits d’Ellis Island : histoires d’errance et d’histoire, 1980



Jeannette Gregori - Chouchou et son chien Corso                                                                                                          : + :


jeudi 9 mai 2013

J'avalai cela aussi :


Taxidermia - György Pálfi - 2006


Je sais bien que, lorsqu'il s'agit de leurs exploits amoureux, les hommes ne sont que trop portés à la vantardise. A les entendre, leurs prouesses viriles ne connaissent pas de limite, et ils ne vous font grâce d'aucun détail.
Je ne demande donc à personne de me croire lorsque j'affirme que, pour ma bien-aimée, je consommai encore un éventail japonais, dix mètres de fil de coton, un kilo de noyaux de cerises- Valentine me mâchait, pour ainsi dire, la besogne, en mangeant la chair et en me tendant les noyaux – et trois poissons rouges, que nous étions allés pêcher dans l'aquarium de son professeur de musique.
Dieu sait ce que les femmes m'ont fait avaler dans ma vie, mais je n'ai jamais connu une nature aussi insatiable. C'était une Messaline doublée d'une Théodora de Byzance. Après cette expérience, on peut dire que je connaissais tout de l'amour. Mon éducation était faite. Je n'ai fait, depuis, que continuer sur ma lancée.
Mon adorable Messaline n'avait que huit ans, mais son exigence physique dépassait tout ce qu'il me fut donné de connaître au cours de mon existence. Elle courait devant moi, dans la cour, me désignait du doigt tantôt un tas de feuilles, tantôt du sable, ou un vieux bouchon, et je m'exécutais sans murmurer. Encore bougrement heureux d'avoir pu être utile. A un moment, elle s'était mise à cueillir un bouquet de marguerites que je voyais grandir dans sa main avec appréhension – mais je mangeai les marguerites aussi, sous son œil attentif -elle savait déjà que les hommes essayent toujours de tricher, dans ces jeux-là – où je cherchais en vain une lueur d'admiration. Sans une marque d'estime ou de gratitude, elle repartit en sautillant, pour revenir, au bout d'un moment, avec quelques escargots qu'elle me tendit dans le creux de la main. Je mangeai humblement les escargots, coquille et tout.
A cette époque, on n'apprenait encore rien aux enfants sur le mystère des sexes et j'étais convaincu que c'était ainsi qu'on faisait l'amour. J'avais probablement raison.
Le plus triste était que je n'arrivais pas à l'impressionner. J'avais à peine fini les escargots qu'elle m'annonçait négligemment :
– Josek a mangé dix araignées pour moi et il s'est arrêté seulement parce que maman nous a appelés pour le thé.
Je frémis. Pendant que j'avais le dos tourné, elle me trompait avec mon meilleur ami. Mais j'avalai cela aussi. Je commençais à avoir l'habitude.
Romain Gary, La promesse de l'aube, 1960



mercredi 8 mai 2013

Ce rêve déconcertant :

 
Pierre Chalory - mère plus enfant mort                                                                                                : + :


Et l’amour ? Il faut nous laver
De cette crasse héréditaire
Où notre vermine stellaire
Continue à se prélasser 

L’orgue, l’orgue qui moud le vent
Le ressac de la mer furieuse
Sont comme la mélodie creuse
De ce rêve déconcertant

D’Elle, de nous, ou de cette âme
Que nous assîmes au banquet
Dites-nous quel est le trompé
O inspirateur des infâmes

Celle qui couche dans mon lit
Et partage l’air de ma chambre
Peut jouer aux dés sur la table
Le ciel même de mon esprit
Antonin Artaud, Tric Trac du ciel, 1923


Dado - enfant mort - 1954                                                                                                                                             : + :