mardi 27 août 2013

Toute chose vivante fleurit ici :

 

Les nus de Bonnard

Sa femme. Quarante ans qu'il l'a peint.
Encore et encore. Le nu dans le dernier tableau,
Le même jeune nu que dans le premier. Sa femme.

Comme il se souvenait d'elle jeune. Quand elle était jeune.
Sa femme dans son bain. A sa table de toilette
devant le miroir. Déshabillée.

Sa femme avec ses mains sous ses seins
regardant dehors le jardin.
Le soleil répendant chaleur et couleur.

Toute chose vivante fleurit ici.
Elle jeune et frémissante et désirable.
Lorsqu'elle est morte, il l'a peint encore un moment.

Quelques paysages. Puis meurt.
Et inhumé à coté d'elle.
Sa jeune femme.
Raymond Carver, La vitesse foudroyante du passé
traduit de l'anglais par Julien Belon






Bonnard's Nudes

His wife. Forty years he painted her.
Again and again. The nude in the last painting
the same young nude as the the first. His wife

As he remembered her young. As she was young.
His wife in her bath. At her dressing table
in front of the mirror. Undressed.

His wife with her hands under her breasts
looking out on the garden.
The sun bestowing warmth and color.

Every living thing in bloom there.
She young and tremulous and most desirable.
When she died, he painted a while longer.

A few landscapes. Then died.
And was put down next to her.
His young wife.