La voce della luna - Ferico fellini - 1990 |
- Tout à l’heure, dit Tadeus, devant notre sarrabulho, mais maintenant, si on parlait littérature ? ça fait plus distingué.
- D’accord, répondis-je, parlons littérature, qu’est-ce que tu écris en ce moment ?
- Un petit roman en vers, me dit-il, une histoire de rapports amoureux entre un évêque et une nonne, ça se passe dans le Portugal du XVIIe siècle, c’est une sombre histoire, et même un peu sordide, une métaphore de l’abjection, comment trouves-tu l’idée ?
- Je ne sais pas, répondis-je, est-ce qu’on mange des sarrabulhos dans ton histoire ? à première vue ça m’a l’air d’une histoire qui demande des sarrabulhos. En tout cas, à ta santé, dit Tadeus en levant son verre, c’est toi qui as une âme, mon timide, moi je n’ai qu’un corps, et pour peu de temps par dessus le marché.
- Je n’ai plus d’âme, ripostai-je, maintenant j’ai un inconscient, j’ai attrapé le virus de l’Inconscient, c’est pour ça que je me trouve chez toi, et que j’ai réussi à te retrouver.
- Alors à la santé de l’Inconscient, dit Tadeus en remplissant les verres, encore une gorgée et puis on va chez Casimiro.
Nous nous remîmes à boire en silence.
Antonio Tabucchi, Requiem, 1992, traduit du portugais par Isabelle Pereira