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Musée Ettore Guatelli - musée du quotidien : + : : + : |
Qui est parvenu ne serait-ce que dans une certaine mesure à la liberté
de la raison, ne peut rien se sentir d'autre sur terre que Voyageur.
Pour un voyage toutefois qui ne tend pas vers un but dernier car il n'y
en a pas. Mais enfin, il regardera les yeux ouverts à tout ce qui se
passe en vérité dans le monde. Aussi ne devra-t-il pas attacher trop
fortement son cœur à rien de particulier. Il faut qu'il y ait aussi en
lui une part vagabonde dont le plaisir soit dans le changement et le
passage.
Sans doute, cet homme connaîtra les nuits mauvaises où
prit de lassitude, il trouvera fermée la porte de la ville qui devait
lui offrir le repos. Peut être qu'en outre, comme en Orient, le désert
s'étendra jusqu'à cette porte, que des bêtes de proie y feront entendre
leur hurlement, tantôt lointain, tantôt rapproché, qu'un vent violent se
lèvera, que des brigands lui déroberont ses bêtes de somme. Alors, sans
doute, la nuit terrifiante sera pour lui un autre désert, tombant sur
le désert, et il se sentira le cœur las de tous les voyages.
Dès
que le soleil matinal se lève, ardent comme une divinité polaire, que
la ville s'ouvre, il verra peut-être sur les visages de ses habitants
plus de désert encore, plus de saleté et de fourberie et d'insécurité
que devant les portes. Et le jour, à quelque chose près, sera pire que
la nuit. Il se peut bien que tel soit à quelque moment le sort du
Voyageur.
Mais pour le dédommager viennent ensuite les matins
délicieux d'autres contrées, nés des mystères du premier matin. Il songe
à ce qui peut donner au jour entre le 10ème et le 12ème coup de
l'horloge, un visage si pur, si pénétré de lumière, de sereine clarté
qui le transfigure.
Il cherche la philosophie d'avant midi.
Friedrich Nietzsche, Humain, trop humain,
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