lundi 24 septembre 2012

Satisfaire nos désirs :

Richard Long - Muezzin - c2000 - +

L'irritation du doute est le seul mobile qui nous fasse lutter pour arriver à la croyance. Il vaut certainement mieux pour nous que nos croyances soient telles, qu'elles puissent vraiment diriger nos actions de façon à satisfaire nos désirs. Cette réflexion nous fera rejeter toute croyance qui ne nous semblera pas de nature à assurer ce résultat. La lutte commence avec le doute et finit avec lui. Donc, le seul but de la recherche est d'établir une opinion. On peut croire que ce n'est pas assez pour nous, et que nous cherchons non pas seulement une opinion, mais une opinion vraie. Qu'on soumette cette illusion à l'examen, on verra qu'elle est sans fondement. Sitôt qu'on atteint une ferme croyance, qu'elle soit vraie ou fausse, on est entièrement satisfait. Il est clair que rien hors de la sphère de nos connaissances ne peut être l'objet de nos investigations, car ce que n'atteint pas notre esprit ne peut être un motif d'effort intellectuel. Ce qu'on peut tout au plus soutenir, c'est que nous cherchons une croyance que nous pensons vraie. Mais nous pensons que chacune de nos croyances est vraie, et le dire est réellement une pure tautologie.
(...)

Richard Long - Nomad - c1990

Or il existe des personnes, au nombre desquelles, je dois le croire, se trouve le lecteur, qui, dès qu'elles verront que l'une de leurs croyances est déterminée par quelque circonstance en dehors de la réalité, admettront à l'instant même et non pas seulement des lèvres que cette croyance est douteuse, mais en douteront réellement, de sorte qu'elle cessera d'être une croyance.
(...)
Richard Long - fives stones - c1970

Par dessus tout, il faut considérer qu'il y a quelque chose de plus salutaire que toute croyance particulière : c'est l’intégrité de la croyance, et qu'éviter de scruter les bases d'une croyance, par crainte de les trouver vermoulues, est immoral tout autant que désavantageux. Avouer qu'il existe une chose telle que le vrai, distinguée du faux simplement par ce caractère que, si l'on s'appuie sur elle, elle conduira au but que l'on cherche sans nous égarer, avouer cela et, bien qu'en en étant convaincu, ne pas oser connaître la vérité, chercher au contraire à l'éviter, c'est là, certes, une triste situation d'esprit.
       (À suivre.)

 La logique de la science, Comment se fixe la croyance ?, Charles-Sanders Peirce, 1878, +pdf


Matfré Ermengau - Breviari d’amor et Lettre à sa sœur - 14ème siècle - +