jeudi 11 octobre 2012

Le regard que nous portons sur le monde :


written by Gardner Fox - drawn by Murphy Anderson -
1961 - +

Le processus de valorisation de la marchandise, qui repose sur la production de la plus-value, ne peut être maintenu et accentué que par la mise au labeur d’une partie croissante de la force de travail disponible ou par la multiplication des objets produits. La plus-value demande à être indéfiniment accrue, pour que l’accumulation, simplement, ne s’interrompe pas et que le capitalisme ne s’effondre pas. Nous percevons là, au moins intuitivement, en quoi sont résolument vains les discours sur la croissance et la décroissance et, encore plus, ceux sur la régulation de l’économie capitaliste. Le Capital ne peut que croître et vouloir croître. Il doit croître ou mourir.
La valeur des marchandises ainsi produites contient donc une part déterminée, qui représente l’investissement matériel (les matières premières, les moyens de production, etc.) et une part mouvante, qui valorise la valeur, l’accroît, c’est la dépense sociale de force de travail. Cependant, cette dépense de force de travail a des limites, essentiellement biologiques. Une fois que tous les hommes ont été mis au service de la production capitaliste, femmes et enfants compris, une fois que la journée de travail a atteint ses limites raisonnables, une fois que l’intensité du travail a elle aussi atteint ses limites, et que la partie productive du Capital menace de sombrer sous l’épuisement, seule la machine peut contribuer à un accroissement de la productivité et tendre vers une production illimitée de marchandises qui, quant à elles, contiennent individuellement de moins en moins de plus-value, ont de moins en moins de valeur. C’est ce que Marx a appelé la « tendance à la baisse du taux de profit », signifiant par là que le phénomène corrélatif à la démultiplication quantitative des objets marchands est la baisse constante de la plus-value qu’ils contiennent jusqu’à ne plus en représenter qu’une part infinitésimale. Ce phénomène par lequel plus il est produit de marchandises et moins chacune d’elle contient de valeur implique à son tour que le Capital en produise toujours de plus en plus. C’est la seule explication qui permette de comprendre pourquoi la technologie n’avait connu, avant, aucune expansion et aucun perfectionnement équivalents à ce que nous connaissons depuis environ deux cents ans. Le capitalisme est le règne absolu d’une productivité qui demande, qui réclame et nécessite, un constant accroissement, une constante intensification, c’est-à-dire des machines de plus en plus performantes et une consommation d’énergie toujours élargie à de nouvelles sources.
Les machines, jusqu’alors subordonnées en tant que simples objets technologiques à une technique elle-même assujettie aux impératifs des formes d’organisation qui en conditionnaient l’évolution, occupent ainsi, aujourd’hui, une tout autre position.




Il faudrait plutôt partir d’une évaluation de la puissance de calcul totale désormais en usage sur la planète et traduire cela en termes démographiques. Un tel compte ferait apparaître que la planète Terre est désormais peuplée par une puissance de calcul de centaines de milliards d’équivalent-hommes. Cette puissance de travail a largement affecté le regard que nous portons sur le monde et la façon dont nous nous le représentons. Il a modifié la vie politique, économique et culturelle des sociétés que nous qualifions encore d’“humaines“ alors même que le fonctionnement des sociétés est désormais composé majoritairement de ces équivalent-hommes dont la démographie, la sociologie et l’économie politique entrent en compétition avec l’humanité quant aux finalités que cette dernière peut se donner à elle même.
Bureau d’études, La planète laboratoire 4 octobre 2011, +




Oui, l’élimination de la magie a ici le caractère de la  magie elle-même
Wittgenstein, Remarques sur le Rameau d’or de Frazer